La fin de l’argent gratuit

14 juin 2022
-IAM, News

Hugues Chevalier, Economist

Depuis plusieurs semaines, les taux d’intérêt ont augmenté brutalement dans un contexte de vive résurgence de l’inflation. C’est un retournement majeur, car emprunter n’est plus gratuit et nécessite de payer des intérêts. Ainsi le taux à 10 ans allemand (Bund) est ressorti à 1.06% le 31 mai dernier contre -0.3% à la fin de 2021. Ces niveaux restent encore bas au regard des moyennes de long terme. Mais depuis 1980, les taux étaient en baisse constante pour atteindre des niveaux négatifs lors de la crise du Covid. Ce retournement se produit alors que le niveau de la dette n’a jamais été aussi élevé. Ainsi, selon l’UBS, le taux d’endettement dans la zone euro (tout secteur de l’économie) a atteint 400% du PIB au cours du dernier trimestre 2021, soit 19 points supplémentaires par rapport à la fin 2019. L’inversion de tendance et la sortie des taux négatifs est une bonne nouvelle pour les épargnants durement touchés ces dernières années, avec des rendements nuls ou même négatifs. Par ailleurs, les taux réels à court terme et à long terme restent, pour l’instant, à des niveaux très bas. Mais dans les mois à venir, les taux vont continuer à progresser sous la pression, notamment, de la poursuite de la hausse de l’inflation et de la remontée des taux directeurs par les banques centrales. Cela va être un changement complet de paradigme pour les emprunteurs, que ce soit les Etats, les entreprises ou les ménages. Plusieurs pays empruntent déjà à des niveaux plus élevés que leur taux moyen de remboursement, comme la France ou l’Italie. Toutefois, les risques les plus importants concernent les pays émergents qui voient leur taux d’intérêt s’envoler. Pour les ménages, la fin de l’argent gratuit affectera le secteur de l’immobilier résidentiel et donc le secteur de la construction. En revanche, pour les entreprises, compte tenu de leur niveau de trésorerie, l’impact devrait être limité.

Loading...